La Baie d’Hudson, fondée en 1670, est l’une des entreprises les plus anciennes d’Amérique du Nord. Symbole du commerce de détail au Canada, elle a longtemps été un pilier incontournable du magasinage, offrant une variété de produits allant du prêt-à-porter aux articles ménagers. Pourtant, au fil des décennies, elle a perdu son éclat et sa pertinence dans un marché en pleine transformation. Les difficultés financières récentes et les tentatives de restructuration témoignent de son incapacité à s’adapter aux nouvelles réalités du commerce de détail.
En tant que consommateur et professionnel du marketing, j’ai observé cette descente progressive. Autrefois fidèle client, je me suis peu à peu éloigné de La Baie, non pas par manque d’intérêt pour son offre, mais en raison de décisions stratégiques maladroites et d’un manque flagrant d’innovation dans son approche marketing et commerciale. La Baie n’a pas su évoluer avec les nouvelles attentes des consommateurs ni moderniser son positionnement. L’offre s’est complexifiée, parfois au détriment de la clarté et de l’expérience client. Analysons ce qui a contribué à cette situation et comment l’entreprise pourrait se repositionner pour redevenir un acteur pertinent.
⚠️ Cet article reflète mon point de vue personnel, basé sur mon expérience en tant que consommateur et professionnel du marketing, ainsi que sur mon observation des tendances du commerce de détail. Il ne prétend pas offrir une vérité absolue, mais plutôt une analyse critique et une réflexion sur les défis auxquels font face les entreprises historiques comme La Baie d’Hudson.
Pourquoi La Baie d’Hudson a-t-elle perdu son attrait ?
Pendant longtemps, magasiner chez La Baie faisait partie de mes habitudes. C’était un endroit où je savais que je trouverais ce dont j’avais besoin sans avoir à multiplier les arrêts. Je pouvais y acheter des vêtements, des souliers, du linge de sport, et compléter mes achats avec des articles pour la maison. Cette diversité, combinée à une certaine confiance envers l’enseigne, en faisait une destination incontournable. Mais, au fil des ans, cette expérience s’est dégradée, au point où je me suis surpris à ne plus y aller du tout.
L’une des premières raisons qui m’a poussé à délaisser La Baie, c’est la qualité incertaine des produits. Il m’est arrivé d’acheter des vêtements qui semblaient bien en magasin, mais qui, après quelques lavages, perdaient leur forme ou leur couleur. D’un côté, l’enseigne propose des marques de luxe, et de l’autre, des produits qui rappellent le fast fashion, sans qu’il soit toujours évident de distinguer les deux. À plusieurs reprises, j’ai payé un prix relativement élevé pour un article dont la durabilité ne dépassait pas quelques mois. Cela a fini par créer un doute dans mon esprit chaque fois que je considérais un achat chez eux.
La gestion des stocks a aussi joué un rôle dans mon désengagement progressif. J’ai souvent vu des articles disponibles sur le site web, pour finalement découvrir qu’ils étaient en rupture de stock une fois en magasin. Pire encore, certains produits n’étaient tout simplement pas disponibles pour l’achat en ligne, ce qui m’obligeait à faire le déplacement avec le risque de repartir les mains vides. Après plusieurs expériences frustrantes, j’ai cessé d’essayer.
Les stratégies promotionnelles agressives de La Baie ont également contribué à mon désintérêt. Les rabais incessants, parfois conditionnés à l’obtention d’une carte de crédit, donnaient l’impression que les prix étaient gonflés artificiellement. À plusieurs reprises, j’ai reçu des courriels promotionnels pour des articles que j’avais déjà achetés quelques jours plus tôt, parfois même avec des offres plus avantageuses que celles dont j’avais bénéficié. Cette surenchère promotionnelle m’a non seulement lassé, mais elle a aussi créé un sentiment de méfiance quant à la réelle valeur des produits vendus.
Enfin, le marketing numérique de La Baie m’a finalement achevé. Leurs courriels étaient omniprésents, parfois plusieurs fois par semaine, et contenaient rarement des recommandations pertinentes. Plutôt que de me proposer des produits en lien avec mes achats passés, je recevais les mêmes offres génériques que tout le monde, axées sur des rabais répétitifs. À une époque où la personnalisation est au cœur des stratégies marketing réussies, La Baie semblait être restée coincée dans une approche dépassée, où la quantité primait sur la qualité de l’engagement.
Comment redresser La Baie d’Hudson ?
Plutôt que de simplement critiquer, voici une réflexion constructive sur ce que pourrait être l’avenir de La Baie d’Hudson. À mon avis, un repositionnement stratégique de l’organisation devrait s’articuler autour de trois axes principaux : l’optimisation de l’expérience en magasin, une transformation dans l’approche de marketing et la refonte du programme de fidélisation.
L’optimisation de l’expérience en magasin
Dans un environnement où le commerce physique doit cohabiter avec le numérique, il est impératif de repenser l’aménagement des magasins. Réduire l’espace plancher pour privilégier les produits les plus populaires et en stock éviterait aux clients la frustration des ruptures et réduirait l’impression d’un magasin fantôme. La Baie pourrait s’inspirer d’exemples récents comme Best Buy, qui a réagi à l’évolution du commerce de détail en transformant plusieurs boutiques La Source en Best Buy Express. Ce modèle plus compact permet d’optimiser l’inventaire, de réduire les coûts d’exploitation et d’offrir une expérience d’achat plus ciblée et efficace.
Dans la même logique, abandonner une présentation par marque au profit d’une segmentation par usage – vêtements professionnels, tenues sportives, articles de maison premium – simplifierait le parcours d’achat. En bref, l’espace physique doit être repensé afin d’offrir une expérience plus fluide, plus agréable et efficace.
Une transformation dans l’approche de marketing
Le marketing a changé de paradigme en quelques décennies. Autrefois centré sur les médias payants, il s’appuie aujourd’hui sur une combinaison de Paid, Owned et Earned Media. La Baie d’Hudson devrait investir davantage dans des stratégies de contenu et d’engagement client plutôt que dans des campagnes promotionnelles répétitives. Avec la montée des coûts d’acquisition et les restrictions sur le suivi, l’enseigne gagnerait à optimiser ses canaux propriétaires (site, infolettre, blogue) et à activer le Earned Media (avis, recommandations, influence).
La refonte du programme de fidélisation
La fidélisation ne peut plus se limiter à des points et des rabais. Les attentes clients se sont transformées : l’expérience, l’engagement et la personnalisation priment. S’inspirer d’enseignes comme Sephora, Nike ou Home Depot — qui misent sur des recommandations personnalisées, des événements exclusifs et des ateliers — permettrait de reconstruire une relation forte et différenciante.
Une problématique plus large : la difficulté à évoluer
La situation de La Baie illustre un défi commun aux marques historiques : peiner à faire évoluer leur stratégie au rythme du marché. L’écosystème marketing s’est fragmenté (Paid/Owned/Earned, réseaux sociaux, IA générative, social commerce, etc.). Une entreprise qui ne revoit pas sa stratégie tous les dix ans risque d’être dépassée. L’approche contemporaine est omnicanale et conversationnelle.
Quelles erreurs typiques ?
- Dépendance excessive au Paid Media au détriment du Owned et Earned Media.
- Compréhension incomplète du parcours client moderne (découverte → recherche → engagement → décision → post-achat).
- Réticence face aux innovations digitales et aux attentes émergentes (social commerce, IA générative, expériences immersives).
TL;DR
L’incapacité à évoluer entraîne un lent déclin. Pour survivre, La Baie doit repenser son modèle en fonction des nouvelles attentes et intégrer les avancées technologiques. Les marques qui performent équilibrent médias payants, propriétaires et gagnés; elles optimisent un parcours client complexe et acceptent que l’innovation et l’adaptabilité soient essentielles.
J’allais oublier, avant que vous ne quittiez…
Cet article fait partie de ma série « Turbulences ». Si vous aimez les réflexions sans filtre et les explorations audacieuses des tendances numériques qui bousculent notre monde, alors Turbulences est faite pour vous.
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